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Philippe Henry

08h25 - 26 septembre 2022 - par Info Haute-Vienne
Philippe Henry
« Nous avons déjà validé la présence de plus de 140 dessinateurs »

Comme en témoigne le regard vachement désenchanté de la mascotte Justine sur l'état du monde, l'humour reste plus que jamais une arme de résistance massive pour les Martellois toujours aussi obstinés à maintenir le festival de la caricature, du dessin de presse et d'humour. Entretien avec Philippe Henry, coprésident.

Quels seront les points forts de cette 41e édition, qui aura lieu du 24 septembre au 2 octobre ?

Comme chaque année, nous présenterons de nombreuses expositions ciblées dont certaines serviront à rendre hommage aux dessinateurs qui nous ont quittés. Nous mettrons aussi en lumière des dessinateurs étrangers, dont l'Ukrainien Vladimir Kazanevsky, qui a fui son pays en mars 2022 et sera donc présent durant tout le festival, et Firoozeh Mozaffari, une dessinatrice iranienne qui a reçu plusieurs prix pour ses œuvres dont celui de la liberté d'expression de Kofi Annan (N.D.L.R. : l'un des anciens secrétaires généraux des Nations Unies), mais qui, malheureusement, ne pourra pas être présente au salon. L'actualité et les problèmes de société ici et ailleurs restent des terreaux fertiles à l'inspiration de nos dessinateurs, mais contrairement à la période post-crise sanitaire, où le Covid avait touché tout le monde et se retrouvait dans de nombreux dessins, cette année les thèmes sont très variés. L'environnement et notamment la sécheresse sont des sujets très présents. La guerre contre l'Ukraine aussi, mais ce n'est malheureusement pas le premier conflit qui se déroule pendant le festival. D'ailleurs, nous n'aurons pas de dessinateurs russes, car visiblement, ils ont quelques difficultés à quitter leur pays, alors que l'Ukraine n'interdit pas à ses ressortissants de voyager et de s'exprimer.

Craignez-vous que la morosité de cette rentrée entrave la fréquentation du salon ?

Après deux années de restrictions sanitaires durant lesquelles nous avons mis un point d'honneur à rester ouverts en apportant toutes les garanties réclamées par les services de l'État, mais nous n'avions que des dessinateurs français ou européens, nous voyons revenir des dessinateurs américains. Ce serait vraiment dommage que le public n'en profite pas pour s'oxygéner la tête. C'est un besoin pour certains visiteurs, mais aussi pour les dessinateurs qui aiment à se retrouver à Saint-Just. Nous avons déjà validé la présence de plus de 140 dessinateurs. Au-delà des rencontres qui peuvent être générées entre eux lors du salon, l'attrait pour notre festival repose également sur l'hébergement chez l'habitant, qui permet de nouer des liens d'amitié très forts. À tel point que de plus en plus de dessinateurs ne souhaitent plus être logés à l'hôtel.

Le salon permet-il encore de soutenir les dessinateurs menacés dans leur pays ?

Oui et nous y sommes très attachés. J'ai gardé le souvenir d'un dessinateur iranien que j'ai accueilli il y a une trentaine d'années et qui m'avait expliqué qu'en embrassant sa famille lorsqu'il était parti de chez lui avec sa valise, il savait qu'il ne les reverrait sûrement pas. Aujourd'hui, il est installé à côté de Lyon et a refait sa vie en France en fondant une nouvelle famille. A Limoges, nous avons Ali Hamra, un dessinateur syrien qui malgré ses longues années de présence en France, rencontre quelques difficultés pour obtenir ses papiers alors qu'il est investi dans la vie locale, que sa femme a un emploi et que ses enfants sont scolarisés.

La liberté du dessin de presse est-elle toujours autant menacée ?

Nous constatons que ce sont toujours les mêmes pays qui restreignent la liberté d'expression, mais lorsqu'on voit la place qui est accordée aujourd'hui au dessin de presse dans les journaux français, on est en droit de se demander si nous n'y contribuons pas un peu également. Ce n'est pas une liberté combattue, mais une liberté réduite par le manque d'argent.

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