Inventaire à la Robert
[caption id="attachment_225451" align="aligncenter" width="800"] Le plus limousin des ethnologues français vient de publier une encyclopédie amoureuse de la limousinité…[/caption]
Avec « Entre Abandon et Zizanie », Maurice Robert livre une encyclopédie amoureuse et amusante de la limousinité. Un inventaire cocasse et minutieux, où l’érudition espiègle de l’ethnologue fait mouche, de A à Z.
« La limousinité est-elle soluble dans la Grande Région ? », s’interroge Maurice Robert en exergue de l’avant-propos au lecteur de son nouveau livre, sous-titré « Défense et illustration de la culture limousine dans la Nouvelle-Aquitaine ». Une région technique et « graphique », dessinée en fonction de critères qui sont tout sauf géographiques ou culturels : car, oui, nous sommes différents ! Et c’est ce que le plus limousin des ethnologues français, déjà auteur, parmi une quarantaine d’autres ouvrages, d’une « Petite histoire du Limousin et de la limousinité » (Geste Editions), s’applique à démontrer dans ce Petit Robert, illustré de moult références savantes, anecdotes et traits d’humour.
Société discrète
Châtaigne, francs-maçons, papes, accordéon, troubadour, Burgout, Guingouin, Ostensions, bonnes fontaines, or, porcelaine ou encore saint Martial : chaque entrée se veut témoin de ce qui a construit, au fil des siècles, l’originalité, les particularismes et l’âme d’un petit « pays », bien au-delà de la géologie de son socle hercynien. « Depuis deux mille ans, les limites du Limousin n’ont pratiquement pas bougé, ce qui est sans équivalent en France continentale, explique Maurice Robert. La région, telle que nous la connaissions avant la réforme administrative, correspondait peu ou prou au territoire des Lémovices, puis à celui de l’évêché. Cette cohésion géographique a contribué à forger une mentalité à l’image de sa région : un peu confinée, autonome, qui a fonctionné sur elle-même, sans esprit de conquête, sans ambition, en dépit des grandes innovations économiques, techniques, sociales, politiques, dont elle fut porteuse. Quand les gens du Nord ont voulu conquérir le Midi par la guerre, le Limousin n’a pas cherché à s’imposer ou à tirer profit de ses atouts, restant discret et vivant en autosuffisance. »
Le mariage d’Aliénor
Aujourd’hui, marié à l’Aquitaine et à Poitou-Charentes, le Limousin ne peut se contenter de vivre comme il vécut. Il doit trouver sa place dans ce vaste espace taillé pour renforcer la compétitivité européenne de Bordeaux et ne pas céder à la tentation de n’être qu’un « arrière-pays », selon le mot d’Alain Juppé, malicieusement repris par Maurice Robert dans son livre. « Le nouveau découpage administratif ne nous oblige en rien à nous intégrer, à nous fondre, dans la Nouvelle-Aquitaine, prévient-il. Nous devons nous situer dans une relation de partenariat, afin de conserver notre personnalité, non par orgueil mais par obligation. Nous pouvons développer ici nos propres savoir-faire et en faire bénéficier les autres, dans une démarche d’association. C’est déjà un bon début pour résister au phénomène de métropolisation et à une forme d’acculturation. » Même s’il n’est pas un grand fan des unions arrangées, Maurice Robert se défend toutefois d’avoir voulu faire un livre polémique. « C’est, tout au plus, un petit cactus qui pourra piquer quelques sensibilités, conclut-il. J’ai d’ailleurs essuyé trois refus de la part d’éditeurs. Or, cet ouvrage ne traite, en vérité, que d’enjeux culturels et sociaux. Il s’adresse à un très large public, composé aussi bien de Limousins fiers d’affirmer leur identité que de personnes venues d’ailleurs, souhaitant découvrir et s’approprier une culture commune forgée au cours des siècles. » Comme on dit chez nous : chabatz d’entrar !Photo © Yves Dussuchaud
« Entre Abandon et Zizanie : défense et illustration de la culture limousine dans la Nouvelle-Aquitaine », éditions Salves d’Espoir / Solilang, 215 pages, 15 €.
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